20-04-2024 04:04 AM Jerusalem Timing

Le référendum d’indépendance en Ecosse: un séisme pour le Royaume-Uni

Le référendum d’indépendance en Ecosse: un séisme pour le Royaume-Uni

Dans tous les cas, le scrutin changera en profondeur la face du Royaume-Uni.

Les Ecossais vont réécrire l'histoire jeudi à l'occasion d'un référendum ultra serré: la victoire du oui se traduira par une indépendance pleine et entière, celle du non par une autonomie accrue. Dans tous les cas, le scrutin changera en profondeur la face du Royaume-Uni.
   
Le rendez-vous promet d'ouvrir un nouveau chapitre dans les relations épiques et souvent guerrières entre le pays des Scots et ses voisins du Sud. Le territoire septentrional a changé une bonne dizaine de fois de statut en 1.400 ans. Tantôt souverain, tantôt vassal, il est depuis trois siècles associé, aux termes de l'acte d'Union de 1707.
   
Le suspense décuple les passions. La dernière batterie de sondages misait sur un succès à l'arraché du non, dont l'avance a fondu au point de s'inscrire dans la marge d'erreur des 3%.
   
La victoire du oui constituerait un triomphe personnel pour Alex Salmond.
Mais le Premier ministre de l'Ecosse semi autonome, turfiste invétéré, est assuré de rafler tout ou partie de la mise, quel que soit le résultat des urnes attendu dans la nuit de jeudi à vendredi.
   
L'économiste de 59 ans a su réveiller les ardeurs identitaires des
Ecossais. Depuis 20 ans, un tiers seulement d'entre eux partageaient son rêve "d'un nouveau pays parmi les 20 plus riches au monde".
   
En redoutable tacticien, il ne s'est pas contenté d'imposer au gouvernement central son référendum. Il l'a aussi contraint à promettre l'octroi de nouvelles prérogatives, notamment fiscales, au Parlement régional d'Holyrood, en cas de succès du non.
   
Les dirigeants des trois partis traditionnels britanniques (conservateur, travailliste et libéral démocrate) largement soutenus par la City, en ont fait le serment, sur papier parcheminé.
   
Environ 8,3% de la population britannique va décider du sort de l'ensemble englobant les Anglais, Gallois et Nord-irlandais, quitte à déclencher un séisme 600 km plus au sud, au palais de Westminster.
   
   - Un Royaume-Désuni en proie aux incertitudes -
   
   
   "La plupart des juristes s'accordent à penser que le Royaume-Uni amputé de l'Ecosse serait l'état successeur qui resterait membre de l'Union européenne, de l'Otan et conserverait son siège au Conseil de sécurité de l'ONU, même s'il doit changer de nom" et de drapeau, relève le journaliste et écrivain Peter Riddell. "Mais ce sont à peu près les seules certitudes".
   
L'incertitude est de mise sur les contours du futur état qui voudrait rejoindre l'UE et l'Otan. La proclamation de l'indépendance interviendrait le 24 mars 2016. Elle serait précédée d'âpres négociations. Londres a refusé a priori d'accorder à Edimbourg l'usage de la livre sterling. Reste aussi à trancher sur le partage de l'or noir de la mer du Nord, de la dette, sur le contrôle aux frontières.
   
Il s'agira, a averti David Cameron "d'un divorce acrimonieux" pas "d'une séparation à l'amiable".
"Ce serait une tragédie si le Royaume-Uni volait en éclats", a-t-il confié par ailleurs dans une interview diffusée mercredi par le Times.
   
Le sort politique du chef du gouvernement britannique, qui entend briguer un second mandat en mai 2015, est loin d'être assuré.
En cas de victoire du oui, trois options s'offriraient à lui, relèvent les analystes: la démission, un vote de confiance, ou des élections anticipées.
   
John Barnes, expert en histoire constitutionnelle, entrevoit "une révolte des tories" sur fond de "grave crise économique." "Si les choses tournent mal, le Premier ministre devra faire la chose honorable", a d'ores et déjà indiqué le député Tory Andrew Rosindell.
   
"Les dirigeants politiques de tous les partis vont payer", estime pour sa part le constitutionnaliste Vernon Bogdanor. Y compris les travaillistes qui perdraient de nombreux électeurs écossais. Mais "le bouc émissaire le plus probable serait le Premier ministre".
   
Le ouf de soulagement en cas de victoire du non à l'arraché, pourrait être de courte durée.
Déjà, une poignée de députés anglais, gallois, nord-irlandais réclament une autonomie accrue. C'est aussi le cas de métropoles comme Manchester et Liverpool.
  

En attendant les scénarios se multiplient, sérieux ou anecdotiques, à propos du Royaume-Désuni.
  

Le club des trois amputés de l'Ecosse europhile serait plus tenté de quitter l'Union européenne.
  

Elizabeth II pourrait renoncer à passer son mois d'août au château de Balmoral, désormais à l'étranger.
  

Le Times indique, sur la foi d'un sondage Yougov, que 700.000 Ecossais effrayés par l'indépendance pourraient plier bagages. Et plusieurs quotidiens assurent que des millions de billets ont été discrètement acheminés vers le Nord, pour éviter une faillite aux banques d'Ecosse en cas de panique.