20-04-2024 01:03 AM Jerusalem Timing

Quand l’Irak se réveille de sa léthargie…il revient en force à la Maison arabe

Quand l’Irak se réveille de sa léthargie…il revient en force à la Maison arabe

Depuis le retrait des forces US de l’Irak , en passant par le refus de Maliki d’adopter des sanctions contre la Syrie jusqu’à l’affaire Hachèmi , l’Irak a réussi un come-back sur la scène régional impressionnant

Beaucoup d’encre a coulé sur la période post-occupation américaine de l’Irak avant même le retrait des forces d’occupation américaines de l’Irak...Malheureusement, nombreux sont les écrits qui ont tenté de brosser un paysage sombre sur l’avenir de ce pays..

L’une des thèses qui a le plus été véhiculée est que  les  Irakiens sont incapables de gérer une indépendance nouvellement acquise.

A titre d’exemple, on a souligné que l’opposition entre les différents partis politiques risquerait de s’exacerber, dont entre autre  sur  l’allocation de sièges parlementaires, à la suite des dernières élections, sans se soucier d’améliorer les services de bases pour les citoyens.

Autre défi estimé insurmontable est  la corruption, cette dernière étant soi-disant largement répandue dans les institutions publiques.


Ou encore la sécurité… thème cher aux  Etats-Unis qui ne cessent de le brandir comme épouvantail face aux Irakiens. Bref autant d’obstacles à une transition réussie et tout en douceur du peuple irakien vers une nation indépendante..

Or, les prémisses de la volonté d’indépendance et d’autonomie des Irakiens se sont révélés bien avant le retrait des forces d’occupation : un retrait qui il faut le rappeler n’a pas été renégocié.. 


Bras de fer entre Bush et Maliki: la souverainneté irakienne l'emporte

En effet, la menace par l’administration Bush de retirer tout appui économique et militaire au gouvernement irakien, si ce dernier n’accepte pas l’accord sur le statut des forces américaines en Irak, n’a pas fait fléchir les responsables politiques irakiens, qui se sont opposés à toute forme de légitimation de la présence militaire des Etats-Unis - et en particulier à la reconnaissance d’un droit à l’extraterritorialité juridique pour les troupes américaines dans le pays !

Il faut dire, et là nous ouvrons une parenthèse, que pour la plupart des Irakiens celui-ci rappelle trop les conditions injustes du pacte qui avait attribué des droits sur le plan militaire à l’impérialisme britannique en Irak de 1930 à 1958. Le symbolisme de la domination étrangère, inhérent à ce parallèle historique, fait courir aux dirigeants des partis politiques et aux membres du Parlement le risque d’être considérés comme complices de tout accord qui accorderait des privilèges spéciaux aux États-Unis.

Mais encore..

Dans un discours prononcé devant un parterre de responsables militaires irakiens et américains à Camp Victory, complexe militaire situé au nord de la capitale et considéré comme l'un des symboles de l'invasion américaine en Irak, le premier ministre irakien Nouri al-Maliki a salué comme une «victoire historique» le refus de son gouvernement de prolonger le mandat des GI: une victoire «qui restera dans les mémoires après le retrait des troupes américaines de tout le territoire irakien», avait-t-il dit.

Mais c’est surtout dans le dossier syrien, que l’Irak a démontré sa volonté de s’imposer sur la scène régionale, au grand dam des pays du Golfe, comme une nouvelle force régionale incontournable et surtout qui partage un rôle axial avec l’Iran, la Syrie, le Liban et la Palestine occupée dans le projet de résistance américano-sioniste..

Deux faits voire trois  résument et marquent le retour en puissance de l’Irak sur la scène arabe : le discours de Maliki à la Maison Blanche, le sommet arabe de Bagdad et l’affaire Hachémi.

La bombe de Maliki à la Maison Blanche

Là encore, la presse américaine et européenne a beaucoup misé sur cette visite pour un renforcement des relations bilatérales entre les Etats-Unis et l’Irak, mais surtout pour un repositionnement de ce dernier en faveur des Etats-Unis dans le dossier syrien..

Mais les propos sans équivoque de Maliki concernant le refus catégorique de son pays à toute forme d’ingérence en Syrie, voire à l’adoption de sanctions ont eu l’effet d’une bombe sur les ténors occidentaux de la guerre menée contre la Syrie.

Et pour cause : d’abord, le contenu des propos de Maliki reflètent l’échec de la diplomatie américaine à convaincre Bagdad de se rallier à leurs rangs et ce malgré les promesses d’une coopération économique et ensuite le lieu géographique (la Maison Blache)  d’où le premier ministre irakien a souligné la priorité les intérêts stratégiques irakiens à toute autre considération

 

D’ailleurs, à la conférence de presse conjointe tenue par le Premier ministre irakien Nouri al-Maliki et le président américain Barack Obama, le contraste d'attitudes entre les deux pays n’a pas échappé à Obama qui a dû reconnaitre  l'existence de différences entre Washington et Bagdad sur la façon de traiter avec la crise en Syrie..

« Nous ne sommes pas contre les aspirations du peuple syrien, ni d’aucun peuple arabe, mais pas nous n’avons pas le droit de demander au président syrien  de démissionner et ne nous ne voulons pas d'exercer ce rôle (..) je me soucie des intérêts de l'Irak et de la sécurité de la région et je sais que les pays de la région sont interdépendants et leurs intérêts doivent être pris en compte » avait martelé Maliki, une allusion que les intérêts stratégiques de l’Irak viennent bien avant de ceux américains.

 

Après les Américains, venait le tour des pays arabes, que le premier ministre irakien n’a pas hésités à critiquer, surtout  le Qatar et l’Arabie, pour leur soutien militaire aux opposants syriens.
«On ne peut pas renverser de force le gouvernement de Bachar al-Assad, et les aides militaires qu’apportent l’Arabie et le Qatar sont  une ingérence flagrante dans les affaires intérieures de la Syrie et de tous les autres pays arabes», avait déclaré Nouri al-Maliki.


 

Sommet arabe de Bagdad : consécration du rôle régional de l’Irak


Si la participation au 23ème sommet arabe  a été du deuxième voire du troisième degré, force est de constater que rien que sa tenue à Bagdad, après le retrait américain est un acquis incontournable pour le gouvernement irakien, le peuple irakienne et l’Irak..

Selon Dr Nabil Yassin, auteur et analyste politique irakien vivant à Londres, le sommet vient comme un rappel que l'Irak est une partie essentielle de l'histoire arabe, et il a tenu à la restauration des relations avec les Etats arabes à la normale.

A vrai dire, le sommet a été une occasion pour l'Irak, de récupérer son rôle régional, perdu au cours des dernières décennies, un rôle dans lequel il tient à rappeler qu'il ne devrait pas être hors du sommet dans la prise des décisions importantes.


Dans ce contexte, l’explosion de la violence en Irak avant le sommet, près d’une centaine d’attentats à travers le pays, dont l’un en face du siège du ministère irakien des Affaires étrangères prouvent combien la seule tenue de ce sommet à Bagdad irritait l’axe américano-sioniste..

Et le gouvernement irakien a bien compris le message d’où son insistance  à la réussite du sommet, par la voix de son  ministère irakien des Affaires étrangères, qui avait publié après l'attentat un communiqué: "De telles opérations ne sauront dissuader l'Irak, le gouvernement national et la direction du ministère des Affaires étrangères pour assurer le succès du sommet de Bagdad des pays arabes et recevoir des invités …"

Non seulement le sommet arabe s’est tenu, mais en plus les ministres des Affaires étrangères, sont tombés d'accord sur un projet de résolution qui ne mentionne pas le départ du président syrien Bachar al-Assad et l'armement des rebelles syriens.

Sur ce dernier point, Maliki avait  exprimé ses craintes face aux appels de certains régimes arabes, en allusion à Doha et Riad à armer les insurgés syriens du Conseil nationale syrien.

« Ces appels entrainent la région dans une guerre sectaire à long terme, et nous dénonçons et condamnons ces appels », avait-il dit.

Réaction violente de la part du Qatar et de l’Arabie-saoudite..

Ainsi des appels se sont élevés de la presse saoudienne et qatarie pour "boycotter le gouvernement" de Bagdad, en raison notamment de son "soutien" au régime syrien. Le quotidien saoudien al-Watan, estime que Maliki n'a pas attendu "que l'encre des résolutions du sommet de Bagdad ait séché pour se dresser en défenseur du régime bassiste en Syrie".

C’est à ce moment que ces deux monarchies ont décidé de prendre à leur compte l’affaire Hachémi, vice-président accusé de terrorisme et recherché par la justice. S’étant abrité dans un premier temps au Kurdistan irakien, et après un passage à Doha, il se trouve actuellement à Riad. Depuis, de part et d’autre, le différend avec le gouvernement irakien une dimension confessionnelle. 

Au Qatar, le quotidien al-Sharq, proche des autorités, a estimé que M. Maliki, "un dirigeant du parti chiite al-Daawa, mène campagne contre la présence sunnite dans les institutions de l'Etat en Irak". "La campagne contre Hachémi et les sunnites d'Irak est provoquée par les préférences confessionnelles (de M. Maliki) que le peuple irakien rejette", a ajouté le journal.

L’affaire Hachémi : souveraineté et non-ingérence des lignes rouges

Pour l’Irak, l’affaire Hachémi est une affaire judiciaire avant tout et donc il s’agit d’une affaire interne au pays. Par conséquent, quiconque qui tente de se mêler de cette affaire porte atteinte à la souveraineté institutionnelle du pays.
D’ailleurs, le parti de Maleki,  la Coalition de l’Etat de droit a mis en garde tous les pays qui ont accueilli le  vice-président Tareq al-Hashemi, de prendre conscience que l'Irak ne restera pas les bras croisés face à leur attitude envers « un terroriste accusé d’avoir dirigé les Escadrons de la mort ».

Et pour marquer sa volonté à poursuivre cette affaire jusqu’au bout, l’Irak compte présenter, par le biais du Conseil suprême judiciaire, un dossier contre Hachémi,  pour le présenter à Interpol et déclencher un mandat d’arrêt international contre lui.


Une mesure qui comprend un message à qui veut l’entendre que l’Irak post-Saddam, post-occupation américaine n’est plus. Désormais c’est l’Irak souverain, autonome et arabe qui  s’impose sur la scène arabe.