18-05-2024 09:04 AM Jerusalem Timing

"L’affaire du bus 300": comment fut couvert un "crime" du Shin Beth à Gaza

Un agent du Shin Beth reconnait avoir fracassé les crânes de deux combattants Palestiniens à coups de barre de fer sur ordre de son chef direct.

L'enquête d'une télévision israélienne a mis en lumière comment les plus hauts responsables du pays ont couvert l'exécution sommaire par le Shin Beth, de deux résistants palestiniens il y a 27 ans. C'est l'un des dizaines voire des centaines de cas dans l'histoire noire du Shin Beth, le service de sécurité intérieure.

Le 12 avril 1984, quatre résistants Palestiniens de la bande de Gaza, détournent le bus 300 de la ligne Tel-Aviv-Ashkelon avec ses 40 passagers.

Pris en chasse par plusieurs jeeps militaires, l'autocar est finalement stoppé après une course folle près du camp de réfugiés de Deir al-Balah, dans le centre de la bande de Gaza.

Les résistants exigent la libération de 500 Palestiniens détenus par l’occupation israélienne, en échange de leurs otages.

Mais le lendemain à l'aube, une unité d'élite israélienne commandée par le général Yitzhak Mordechaï donne l'assaut, tuant une soldate et deux des résistants Palestiniens.

Les corps des deux autres Palestiniens seront ensuite retrouvés. Dans un premier temps, l'armée soutiendra qu'ils ont succombé à leurs blessures.

En fait, ils ont été capturés vivants, puis tués de sang-froid à coups de crosses et de barres de fer sur ordre du chef du Shin Beth, Avraham Shalom.

 
Malheureusement pour le Shin Beth, le photographe israélien Alex Levac a pris un cliché des deux preneurs d'otages, en vie, conduits à leur mort par des agents du service secret qui tentent en vain de l'éloigner.
 
La photo est publiée par le journal Hadashot, qui sera sanctionné pour avoir bravé la censure militaire.
 
L'affaire du bus 300 éclate. Réouven Hazak, Peleg Radai et Rafi Malka, hauts responsables du Shin Beth, indignés par cette action et surtout par les mensonges de leur chef, consultent Shimon Pérès, alors Premier ministre.
 
"Il (Pérès, actuellement président de l’entité sioniste) nous a dit qu'il fallait à tout prix couvrir Avraham Shalom", a témoigné M. Hazak dans ce programme diffusé dimanche par la Chaîne 10 de télévision.
 
Résultat: Yitzhak Mordechaï, qui a frappé les deux hommes avec la crosse de son pistolet, sera injustement accusé de les avoir tués, avant d'être blanchi bien plus tard.

 

Si j'avais su qu'ils avaient été photographiés vivants, je n'aurais pas donné cet ordre stupide de les abattre

"Deux chefs du gouvernement, Pérès et (Yithzak) Shamir, ont su la vérité. Mais ils étaient prêts à sacrifier un général et à l'envoyer pour longtemps en prison, uniquement pour sauver la mise au Shin Beth", a constaté avec amertume le général Mordechaï.

Mais le Premier ministre Shamir veut clore le dossier. Avraham Shalom et quatre de ses agents vont profiter de la grâce présidentielle que leur accorde le chef de l'entité sioniste à l'époque, Haïm Herzog.

 
Dans une déclaration enregistrée, Ehud Yatom, un agent du Shin Beth, reconnaîtra avoir "fracassé leurs crânes (aux deux Palestiniens) à coups de barre de fer" sur ordre de son chef direct, Avraham Shalom. Il deviendra ensuite député du Likoud (droite).
 
"Si j'avais su qu'ils avaient été photographiés vivants, je n'aurais pas donné cet ordre stupide de les abattre", a de son côté confessé Shalom.

 

 

AFP+ Equipe du site