25-04-2024 09:49 AM Jerusalem Timing

France: feu vert attendu à une loi controversée sur le renseignement

Les adversaires du projet dénoncent l’instauration de "méthodes de surveillance lourdement intrusives".

Les députés français doivent voter mardi un projet de loi controversé sur le renseignement, défendu par le gouvernement au nom de la lutte contre le terrorisme mais cible de multiples critiques contre la menace d'une "surveillance de masse".

"Notre pays sera plus fort avec l'adoption de ce texte", a estimé lundi le Premier ministre socialiste Manuel Valls, se montrant certain que "cette loi (...) recueillera une large majorité".

Le projet avait été mis en chantier dans la foulée des attentats de janvier à Paris.

Pour le chef du gouvernement, le ralliement attendu de nombreux députés de l'opposition de droite démontre, "au-delà des clivages politiques, le sens des responsabilités et de l'Etat des responsables publics quand notre pays est confronté (...) à une menace terroriste sans précédent".

Après le vote des députés, le projet de loi doit encore être avalisé par le Sénat.

Dans un souci d'apaisement, le président François Hollande a annoncé qu'il saisirait le Conseil Constitutionnel au terme de la procédure parlementaire, afin d'apporter la "garantie" d'un texte "bien conforme" à la loi fondamentale.

Mais cette initiative, inédite en France pour un chef de l'Etat, n'a pas calmé les craintes des adversaires du projet, qui dénoncent l'instauration de "méthodes de surveillance lourdement intrusives".

A Paris, plusieurs centaines de protestataires se sont rassemblés en fin de journée lundi aux abords de l'Assemblée nationale pour une manifestation "24 heures avant 1984", en allusion au célèbre roman de George Orwell.

Une manifestation similaire s'est également tenue à Toulouse (sud-ouest).

Parmi les contestataires, l'extrême gauche mais aussi les écologistes, une multitude d'associations, dont Amnesty International, et des syndicats de magistrats ou de journalistes.

A l'extrême droite, le Front national de Marine Le Pen a aussi dénoncé la perspective d'un "flicage généralisé".

L'Association française des victimes du terrorisme (AFVT) a exprimé lundi ses inquiétudes en réclamant "davantage de garde-fous législatifs" pour "garantir le respect des droits fondamentaux".

Le projet de loi définit à la fois les missions des services de renseignement (de la prévention du terrorisme à l'espionnage économique) et le régime d'autorisation et de contrôle de l'utilisation de certaines techniques d'espionnage (écoutes, pose de caméras ou de logiciel-espion, accès aux données de connexion, etc.).

La crainte de pouvoirs "exorbitants" donnés aux services de renseignement a été exprimée par la Commission nationale Informatique et Libertés, autorité administrative indépendante, par des magistrats et par de nombreux acteurs du numérique opposés à toute "écoute systématique et de masse".

Un point cristallise les inquiétudes: la mise en place, sur les réseaux des opérateurs, d'outils d'analyse automatique pour détecter par une "succession suspecte de données de connexion" le profil de personnes pouvant présenter une "menace terroriste".

Le dispositif est qualifié de "boîte noire" par ses détracteurs, qui y voient le début d'une surveillance de masse.

Ces boîtes noires seraient installées directement chez les opérateurs et les hébergeurs internet et ne donneraient pas accès au contenu des communications, mais uniquement aux métadonnées.

L'exécutif met en avant le renforcement du contrôle des services avec la création d'une "Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement", composée principalement de parlementaires et magistrats.