23-04-2024 10:11 AM Jerusalem Timing

Qatar: peine de 15 ans de prison confirmée pour un poète critique du régime

Qatar: peine de 15 ans de prison confirmée pour un poète critique du régime

Il s’agit du "poème du Jasmin" qui avait rendu rend hommage à la révolution tunisienne, berceau du Printemps arabe et qui avait exprimé aussi l’espoir que le changement touchera d’autres pays arabes..

  
La justice du Qatar, un pays qui s'est posé en fervent soutien aux soulèvements du Printemps arabe, a condamné lundi à un
poète de ce petit émirat du Golfe à 15 ans de prison pour un poème jugé critique du régime de la famille des Al-Thani.
  
La Cour de cassation de Doha a confirmé la peine de 15 ans de prison prononcée en appel contre Mohamed al-Ajmi, alias Iben al-Dhib, jugé depuis son arrestation en novembre 2011 pour "un poème du jasmin" saluant le Printemps arabe et exprimant l'espoir qu'il s'étende aux monarchies du Golfe.
  
"Il a été condamné en cassation à 15 ans de prison", a déclaré  son avocat, Néjib al-Naïmi.
  
Condamné le 29 novembre 2012 à la prison à perpétuité pour "atteinte aux symboles de l'Etat et incitation à renverser le pouvoir", le poète a obtenu en appel en février dernier une réduction de peine à 15 ans de prison.
  
"C'est un jugement politique et non judiciaire", a déclaré lundi Me Naïmi, ancien ministre de la Justice du Qatar, déplorant que ses appels à rouvrir l'enquête pour rejuger son client n'aient pas eu de suite.
  
"Nous ne sommes pas dans un Etat démocratique, avec un Parlement et des institutions élues, pour pouvoir obtenir une nouvelle enquête", a ajouté l'avocat, indigné.
  
Il a indiqué qu'il espérait "une grâce de l'émir", cheikh Tamim ben Hamad Al Thani, le dernier recours pour son client qui, a-t-il dit, "croupit en prison depuis deux ans en isolement".
  
Pendant le procès, l'avocat avait fait valoir qu'il n'y avait "aucune preuve que le poète ait prononcé en public le poème pour lequel il était jugé" et assuré que le texte avait seulement été récité "dans son appartement au Caire".

Le procureur général du Qatar, Ali bin Fetais al-Marri, avait alors déclaré qu'il allait saisir la Cour suprême pour tenter de faire rétablir la peine de réclusion à perpétuité.
  
Un analyste politique koweïtien, Ayed Manae, a déploré qu'un poète soit condamné à une aussi lourde peine de prison. "Ce jugement est déplorable et regrettable pour un poète", a-t-il déclaré , en espérant que l'émir du Qatar lui accorde sa grâce.
  
"Ce poète doit être traité comme un citoyen qatari qui a exprimé une opinion" et le public ne doit pas "être privé des oeuvres des hommes de lettres, au nom de la liberté d'expression", a ajouté l'analyste.
  
Au delà du Qatar, a-t-il poursuivi, "que les autorités des monarchies du Golfe en général fassent preuve de plus de patience à l'endroit des intellectuels qui critiquent des politiques ou des questions de corruption".
  
Le "poème du Jasmin" rend hommage à la révolution tunisienne, berceau du Printemps arabe, et félicite le chef du parti islamiste tunisien Ennahda, Rached Ghannouchi, vainqueur des élections qui ont suivi.
  
Il exprime aussi l'espoir que le changement touchera d'autres pays arabes, dans une allusion aux monarchies du Golfe, affirmant: "Nous sommes tous la Tunisie face à une élite répressive".
  
Dans une référence au Qatar, qui abrite une importante base aérienne américaine, il ajoute: "J'espère que sera bientôt le tour des pays dont le dirigeant s'appuie sur les forces américaines".
  
L'émir de l'époque, cheikh Hamad Ben Khalifa Al-Thani, a depuis quitté le pouvoir, après avoir abdiqué en juin en faveur de son fils, cheikh Tamim.
  
La condamnation du poète à la prison à perpétuité avait été vivement dénoncée par l'ONU et plusieurs organisations des droits de l'Homme, d'autant que le Qatar se pose en soutien des soulèvements anti-gouvernementaux, notamment par le biais de sa puissante chaîne satellitaire Al-Jazeera.
  
"Le Qatar doit alléger les restrictions sur la liberté d'expression et s'assurer que les poètes, les blogueurs, les journalistes et autres sont autorisés à exprimer leur opinion sans crainte d'être emprisonnés", a notamment souligné Amnesty International en octobre 2012, peu avant l'ouverture du procès de Mohamed al-Ajmi.